POINT DE CROIX - Elle et lui.

POINT DE CROIX - Elle et lui.

 

 

 

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POINT  DE  CROIX   - Elle et Lui

 

 Elle écrit  :

J’ai vidé la malle à linge : des draps de lit, morceaux de couvre-lits anciens, déchirés et réparés pour certains, de cette réparation qui me valut d’avoir de ma mère la seule leçon de raccommodage( oui : 2 r et 2 m ! ), avec échappée vers le point de croix facile et ludique, et en même temps que le crochet, la simple chainette de crochet mais attention c’est comme pour la poterie : d’un cordon on fait soit un plat soit un napperon, napperon qui ne servira qu’à l’inutile, savoir protéger des choses qui de toutes façons sont  vouées à l’éternité :  ces accoudoirs  de fauteuil qui seront éternels car on  ne s’assied jamais dans les fauteuils de la place avant ( en ardenne, on dit la place, ou la belle place ) .

J’ai trié les draps, mis les  plus vieux dans des housses ( des housses, tiens tiens ).

J’ai ouvert grand la porte au soleil d’automne, et au ciel d’automne, qui eurent tôt fait ce matin de dissoudre le film de gelée blanche au sol.

J’ai mis la lessive à sécher au soleil de midi, fait couler l’eau dans les  seaux, j’ai brossé les abords du poële à bois et, profitant de ce que rien ni personne ne m’en fera remarque ou question,  j’ai mis en branle les éléments du sommet du luxe : portes et fenêtres grand ouvertes au vent d’est et au soleil, clef ouverte du poële à bois qui ronronne à tout-va.

 

Arrive ainsi ce moment où je me sens un peu oiseuse, gagnée  par ce calme qui , si tout va bien,  peut précéder la  sérénité  - bien qu’il puisse y avoir l’un sans l’autre..

Troisième sonate de Rachmaninoff. Je monte le son pour l’entendre dehors. Le son du piano qui coule jusque dans les fleurs du jardin devient corps ondulant. Trois morceaux de chocolat. Je ne suis ni maigrichonne ni rubénienne, je suis altière. Et le chocolat comme la musique ou le café ou le soleil, comme le petit vent d’est, coulent tout autour et dedans.

J’ai mis un livre sur la table. Et dans la maison, portes ouvertes, comme à l’entrée du Léman où les eaux du Rhône en s’y jetant se heurtent à celles du lac, c’est la bataillère, le combat entre l’air du dehors qui sent si bon mais qui est frais et l’air du dedans qui au début a quelque chose de stomacal.

 

 

 

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J’écoute Rachmaninoff, pieds nus, j’ai mis de l’huile d’olive dans la main  et je me masse chacun des pieds, longuement, puis j’enfile des gants de latex pour tourner les pages de Mélusine,  de Jacqueline KELEN, p. 125 à 126 :

 

 

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Brocéliande, photo JVL 31 aout 10

 

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Brocéliande 2 , photo JVL 31 aout 10 

 

 

 

 

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